Maurice Duval, l’Utrillo de la toile cirée

Written by Gregory Haleux

Au milieu des années 50, la dernière page de Détective  — « l’hebdomadaire des secrets du monde » — était souvent consacrée à un artiste insolite. Ces portraits, non signés, étaient écrits par Robert Giraud ; les photographies, pas toujours créditées, étaient de Robert Doisneau.
Cette page sur Maurice Duval est parue dans le n°427 du 6 septembre 1954.

 


image en deux parties

 

Robert Giraud reviendra sur Maurice Duval dans Le Royaume d’Argot (Denoël, 1965) et dans Paris, mon pote (Le Dilettante, 2008) :

 

Sur les quais de la Seine, un peintre au travail n’est plus une curiosité, il y en a trop. Pourtant, si un peintre vêtu de hardes est assis à même le sol, devant un petit carton et une boîte de peinture pour enfant, on s’arrête.
En ce temps-là, Maurice Duval vivait sur les quais, entre le Pont du Carroussel et le Pont des Arts. Sa dernière expérience datait du Pont de l’Alma. Il y avait monté une guitoune et faisait équipe avec un Arabe comme lui de la zone. Il possédait même une casserole où l’Arabe faisait la cuisine sur un feu de bois récolté aux Halles. Duval. n’ayant pu s’habituer aux plats trop épicés de son compagnon, partit un soir. Depuis, il vit seul, il est toujours seul et cela remonte à 1937, année où il abandonna, sans trop savoir pourquoi, l’usine où il travaillait, sa femme et son enfant. Le pont de Grenelle l’accueillit. Il resta sur les quais et mit douze ans pour aller de Grenelle au Pont des Arts.
Il fallut peu de choses pour changer l’existence de Maurice. À force de voir des peintres toujours aussi nombreux et acharnés, il en vint à se poser une question : « Pourquoi n’essayerais-je pas moi aussi ? » C’était la première fois, depuis qu’il était sur le tas, qu’une idée aussi saugrenue venait de germer en sa tête. Il s’en rendit compte subitement, et pour la chasser essaya de dormir un peu. Au réveil, elle était toujours là et si par malheur il l’oubliait un instant, la vue d’un peintre remettait tout en question.
Notre homme devait peindre. […]

 

 

Voir le blog qu’Olivier Bailly, son biographe, consacre à Robert Giraud.

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